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Aéroport du Touquet : vent-arrière standard au nord d'Etaples (angle de vue E-W)
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L'idée
Météo-France prévoyant du radieux, une balade en Normandie, genre Côte d'Opale, me paraît appropriée. Le principe est vite établi : j'embarque Jojo pour le week-end, déguster des moules-frites dans les derniers rayons du couchant. La suite sera selon l'humeur du moment...
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La préparation
La nav' est vite préparée ; décollant près d'Etampes, le cap est plein nord, niveaux pairs, écornant la TMA2 Beauvais, histoire de justifier le transpondeur de mon ULM. Je prévois quelques dégagements et en imprime les VACs au cas où... Sérieuse prévol, pleins à toc' (70 litres de 95) afin de pourvoir aux besoins du Jabiru 2.2 si des envies d'excursion se font sentir, puis chargement du gigantesque coffre du Guépy : une tente, deux duvets, deux matelas, deux queues de cochon et des sangles, une lampe à diodes, quelques bricoles de camping... Fringues et effets personnels occupent un petit sac à dos. Mine de rien, le devis de masse ne dépasse pas les 450 kg légaux. Décollage prévu à 16h30 locale, histoire de ne pas se colter les turbulences (place au plaisir sans contrepartie !). Le vent est contraire pour 6 à 10 kts, ce qui établit la vitesse/sol à quelques 140 km/h, 2 heures tout au plus.
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L'aérodrome du Touquet Paris-Plage vu par satellite (source Google maps)
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Le voyage
Le vol est un régal. Les conditions sont CAVOK comme annoncé par MTO-France ; ne persiste que le léger voile d'humidité qui trouble désormais souvent l'horizon. Quelques bulles thermiques facétieuses tentent vainement de nous sortir de la béatitude contemplative que provoque l'altitude. Plutôt que tirer tout droit sur Le Touquet, nous nous déroutons sur Le Tréport (cap NNW) à partir de Formerie (sortie de TMA Beauvais). Cela permettra de longer la côte par Mers-les-Bains (aérodrome privé de Eu), Ault, Cayeux-sur-Mer, la baie de Somme, Le Crotoy, Fort-Mahon, la baie d'Authie, Berck (aérodrome ouvert à la CAP), sur une cinquantaine de kilomètres (le plaisir justifie à lui seul les 20 km de détour).
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L'arrivée au Touquet
En vue du Touquet par le sud, à 4 nautiques, le point d'entrée Sierra ne se matérialise pas de façon évidente : la piste hélico reste un mystère et le pylône n'émerge pas. Tant pis, notre localisation est assez précise pour une annonce radio dans la CTR. Attention pour ceux qui se réfèrent à des cartes anciennes, la fréquence de l'ATIS est changée depuis 2006 (affichez bien 123,125). Le transpondeur n'est pas demandé par le contrôle. Ce soir le trafic est « fluide », puisque seuls deux aéronefs occupent la fréquence TWR : l'un au décollage, l'autre (nous) à l'arrivée. Quelques échanges brefs pour les clairances, la base proposée est en 32 main gauche, qu'on repère facilement en pointant le capot moteur sur le pont de chemin de fer. On évite ainsi de gêner les habitants de La Coquerille. La finale face au front de mer longe l'estuaire de la Canche. Une dernière occasion de shooter quelques images sympa ou de profiter une dernière fois de la vue. L'ULM se pose court ; la piste est dégagée sur l'ancien axe transversal. Le contrôle organise les stationnements au mieux des intérêts des visiteurs, offrant les places sur filin aux appareils les plus légers à convenance. Comme on passe la nuit sur place, nous prenons cette option, ce qui nous place à côté d'un magnifique PA 46.
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L'accueil
Qu'on descende d'un jet ou d'un ULM, l'arrivée dans un terminal d'aéroport réserve très souvent un accueil agréable. Un doux euphémisme en ce qui concerne Le Touquet ! Au comptoir, notre hôtesse devance nos demandes afin d'y satisfaire au mieux. En quelques minutes, les vélos sont loués, le plan de la ville empoché, tous les renseignements échangés... Arrive Dominique, agent de piste qui, lorsque je lui demande si le parking est sécurisé la nuit, nous propose spontanément de rentrer le Guépy au hangar, pour le protéger de la rosée et du vent : « tant qu'il y a de la place, il faut l'occuper ! ». Aussitôt dit, aussitôt fait, je range l'ULM derrière un DR 400. Lorsque je lui demande les horaires d'ouverture du hangar, Dominique rigole : « ici, on ne ferme jamais les portes, ça ne craint pas ! ».
En campeurs sauvages occasionnels, nous demandons où il est possible de monter notre guitoune : le long de la Canche ; en bord de mer... ? Encore une fois, la réponse dépasse nos espérances : « pourquoi pas au fond du parking herbe ! Près du restaurant vous serez tranquille ». Alors là, on ne s'y attendait pas. Planter la tente sur la pelouse d'un aéroport international, c'était pas prévu au programme. Arrive Jean-Jacques Fromentin, le directeur de l'aéroport qui confirme l'autorisation, ajoutant qu'il sera possible de prendre une douche au local des pompiers le lendemain. Un accueil comme celui-là, ça force le respect.
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Le resto à vélo
Ils font les choses bien au Touquet. Les vélos de location sont de très bonne qualité et bien entretenus. Il est vivement conseillé de réserver avant de venir, car lorsque débarquent les aéro-touristes, le stock pourtant impressionnant tend vers zéro. Notre bonne étoile veillant au grain, il reste quelques bécanes dont deux nous sont louées. Le centre-ville du Touquet-Paris-Plage est distant d'environ 2,5 km de l'aérogare. Une balade qui peut se faire à pied, mais tellement mieux à vélo. D'autant que c'est plat, et qu'on traverse un havre de paix, à mi-chemin entre lotissement de standing et domaine forestier. Ceux qui connaissent la forêt du Lys à Chantilly n'ont qu'une vague idée de l'opulence qui règne en ce lieu. Chaque demeure a son style, la faute de goût n'ayant pas cours ici. Pour mettre dans l'ambiance, l'arrivée au Touquet passe par la place de l'Hermitage, et le casino que jouxte le syndicat d'initiative. Passage devant le Westminster Hotel, dont la façade rappelle qu'un minimum de tenue sera appréciée de la population locale. L'avenue St Jean prolonge le parcours jusqu'au front de mer. On croise les rues commerçantes bien tenues, calmes et propres, où boutiques de luxe alternent avec les restaurants touristiques. On choisit de longer la côte vers le sud avant de se décider pour l'estaminet où nous nous dînerons. Le Matisse a notre préférence. C'est central, vivant, accueillant et pas trop cher. Et surtout, on y trouve des moules ! La nuit s'est installée sur le Touquet. On reprend les vélos et repartons vers l'aéroport, monter la tente à l'endroit prévu. La suite appartient à Morphée...
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Le petit matin
Debout de bon matin, j'apprivoise les premiers rayons du soleil dans l'objectif de mon Canon ; il n'est pas encore 7h00 et l'aéroport dort encore. La lumière rasante éclaire de façon surnaturelle les bâtiments de l'aérogare, dont les vitres reflètent leur éclat doré sur le tarmac. La légère brise vire au SE, annonciatrice d'un retour à contre. L'histoire se répète inlassablement : que je sois à vélo ou en avion, le vent ne m'accorde jamais la faveur de son aide. Peut-être ne m'aime-t-il pas. Après une balade à pied le long de la Canche, le terminal ouvre (enfin) ses portes. Jojo et moi ne sommes pas encore bien frais quand on s'y pointe pour saluer le personnel qui nous a si bien accueillis la veille. Un café nous est offert, après quoi nous repartons pour Le Touquet prendre le petit déjeuner. Nous optons cette fois pour le front de mer, les bars de plage, plus précisément L'Enduro (qui porte le nom de la célèbre épreuve sportive motocycliste « l'enduro des sables »).
Deux grands noirs et quatre croissants comblent nos estomacs. Nous pouvons dès lors pousser plus au nord jusqu'au centre nautique que baigne la baie de la Canche. Retour par l'hippodrome, ce qui double presque la distance (raisonnable à vélo). Après une matinée passée à discuter avec les pilotes locaux, replier la tente, ranger nos effets, prévoler le Guépy et vérifier la nav', nous déjeunons à l'Escale, le restaurant de l'aéroport. Pour tenir le budget, nous déclinons la carte gastronomique et prenons la carte brasserie ; c'est déjà très bien, tant en termes de choix, que de qualité ou de prix. C'est dimanche PM et les anglais ont envahi le coin. Plus un vélo à louer ; à peine avons-nous posé les nôtres qu'ils repartent en location ; le terminal connaît une activité qu'on ne rencontre que rarement sur les aéroports provinciaux. Entre les nombreux mouvements d'aéronefs, un Jet Cessna Citation effectue une rotation privée pour Brighton. Nous discutons avec un couple en Jodel DR 221 qui repart pour la Suisse. Leur mini-vélo pliant Brompton attire d'autres équipages d'ailleurs. Rejoignant notre vaillant Guépy qui se passe d'avitaillement, nous rencontrons un pilote hélico privé, propriétaire d'un Colibri EC 120 équipé IFR. J'ai connu le bonhomme dans une autre vie, dans d'autres contrées... Le monde est petit.
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Le vol retour
17h00. Inutile de chauffer le moteur au parking, nous ne sommes pas seuls au décollage ; à vue de nez on sera numéro 6 ou 7 derrière des monomoteurs en partance pour l'Angleterre. La radio crépite effectivement en "grand breton". Le contrôleur est relax. Il guide son petit monde jusqu'au point d'arrêt 32 et ordonne les départs. Les décollages s'enchaînent avec régularité, sans attente excessive, ni précipitation hasardeuse ; un boulot propre, sans fioriture complexe dans la phraséo', ce qui, en dépit du trafic donne une radio limpide avec de confortables écarts entre les messages. Décollage sans histoire, je demande un vent traversier par la gauche sud pour longer la côte à 1500 ft côté mer (il est demandé de ne pas troubler la quiétude des plages). Tout est approuvé, rappel en sortie et bye-bye. Merci à ces pro's pour leur boulot. Je n'oublie pas que c'est l'ensemble des français qui paye pour la sécurité de quelques privilégiés ; la moindre des choses est de remercier !!!
Le vol côtier est comme la veille un régal, pour les yeux comme pour le confort. Et comme pronostiqué, dès Le Tréport, sur un cap 155, le vent est contraire pour 6 à 10 kts. Quelle que soit l'altitude choisie, la composante reste défavorable.
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Le bilan
Décidée vendredi dans la journée dès que la météo était assez fiable, la balade a été réalisée selon le schéma établi, avec grande précision. Une sortie d'à peine 600 km (tracé GPS) pour une durée de vol totale de 4h18. Le Guépy a consommé 55 litres de 95 et 20 cl d'huile. J'aime quand un plan se déroule sans accroc.
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